"Pourquoi les associations ne doivent pas pleurer la réserve parlementaire"

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Mais quelle mouche a donc piqué certains responsables associatifs ? Les voilà réduits à défendre la réserve parlementaire supprimée par le parlement lors du vote de la loi pour la confiance dans la vie politique le 9 août dernier. Certes il n’est jamais agréable dans un contexte de réduction des subventions publiques de voir disparaître une enveloppe financière. Mais tout de même.

Tout d’abord il faut le rappeler, la réserve parlementaire concernait relativement peu d’associations. En 2016, sur les 81,86 millions d'euros attribués par les députés, 52 % sont allés aux associations et 48 % à des projets d'investissement des collectivités (à lire dans notre article La réserve parlementaire n’existe plus !). Environ 40 millions donc pour près d’un million et demi d’associations ce n’est certes pas négligeable mais c’est une goutte d’eau par rapport au total des subventions publiques et aux réductions d’impôts pour dons. D'ailleurs combien d’entre vous en ont bénéficié ?  Certes on ne sait pas à quoi serviront in fine ces sommes qui repartiront dans le budget de l’Etat mais elles seront peut-être réaffectées sur des politiques qui concernent les associations et les territoires.

Mais au-delà c’est bien leur caractère totalement arbitraire qui était le plus choquant. Il faut reconnaitre que depuis 2013 et l’obligation de publier la liste des bénéficiaires les choses s’étaient un peu améliorées. Certains parlementaires avaient d’ailleurs mis en place des comités pour instruire les demandes. Mais dans la plupart des cas c’était le député et lui seul qui décidait. Pas de critères, pas de compte-rendu d’emploi, pas d’évaluation de l’intérêt des actions. Il était plus efficace de faire le siège de la permanence parlementaire, voire d’assurer celui-ci de son soutien aux prochaines élections, que de monter un dossier argumenté. Bien sûr, on rétorquera que le parlementaire était parfaitement à même de juger de l’intérêt de l’action présentée. Voire ! Peut-on penser sérieusement que le député ou le sénateur irait soutenir un projet porté par une association qui s’opposerait à sa politique ? Fut-il excellent. En 2015, un rapport de la Cour des comptes établit notamment que sur 550 dossiers étudiés, « plus de 40 % ne comportaient pas toutes les pièces justificatives requises, portaient sur des dépenses inéligibles ou auraient dû appeler une instruction plus approfondie des services de l’Etat sur leur conformité ».

Car et c’est bien là l’essentiel. Cette enveloppe était purement et simplement un avantage pour des députés sortants par rapport à leurs concurrents. Ils pouvaient conforter des alliés, se faire un réseau, ceci avec le soutien de l’argent public. Totalement antidémocratique. Les associations qui sont un creuset et un laboratoire de la citoyenneté ne peuvent le tolérer. Ceux qui pleurent sur les millions disparus feraient bien de s’en souvenir.

Laurent Thoviste, directeur de la rédaction d'Associations mode d'emploi