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La connaissance des associations au niveau local est, aujourd’hui encore, relativement faible. Même le nombre d’associations actives sur un territoire demeure difficile à mesurer. Pour favoriser le développement de la vie associative, le Réseau national des maisons d’associations propose une méthodologie en quatre étapes.
Lorsque l’ancien délégué national du RNMA se rendait dans une ville de France, il était souvent intrigué d’entendre le maire lui annoncer avec un brin de fierté : « ma ville est la ville la plus associative de France ! » Il apparaissait donc bel et bien nécessaire d’objectiviser les choses. C’est pourquoi le RNMA, accompagné par l’économiste Viviane Tchernonog, a engagé en 2006 la démarche de création d’observatoires locaux de la vie associative.
-> A lire : l'interview de Viviane Tchernonog
Première étape : se préparer
En premier lieu, il convient de recenser les données locales disponibles sur les associations, même si elles sont rares. Il s’agit en général des indicateurs socio-économiques du territoire : les créations d’associations et leur évolution ; l’emploi associatif ; etc. Cette première phase doit permettre de définir la démarche et de formuler des hypothèses qui pourront être confirmées ou non avec l’enquête.
Dès cette étape, l’observatoire peut mobiliser les acteurs concernés par l’enquête pour susciter une dynamique partenariale :
- les acteurs associatifs évidemment (associations locales, fédérations, accompagnateurs de la vie associative…),
- les pouvoirs publics locaux (État et collectivités),
- le monde universitaire et de la recherche,
- les médias…
En les associant, on pourra garantir leur implication dans l’enquête et surtout dans la mobilisation post-enquête.
Il faut savoir que la durée de la démarche dans son ensemble est d’environ une année, entre le démarrage et les premiers résultats, selon le contexte et la capacité de mobilisation de la structure porteuse.
Deuxième étape : collecter
Il s’agit dans un deuxième temps de collecter de nouvelles données au travers d’une enquête auprès des associations locales. Cette étape est essentielle car l’échantillon garantit la représentativité des résultats. Il doit être le plus large et le plus diversifié possible. Pour cela, il convient de soigner la diffusion pour toucher un maximum d’associations et de communiquer pour faire connaître la démarche.
L’enquête en elle-même s’appuie sur un questionnaire d’une quarantaine de questions avec un temps de remplissage estimé entre 20 et 30 minutes. Il permet de recueillir les données essentielles à une analyse de la situation associative du territoire :
- le profil des associations (secteur, âge, aire d’intervention…),
- les membres (caractéristiques des adhérents, bénévoles, dirigeants…),
- les moyens de fonctionnement (financements, emploi, moyens matériels…) et les besoins.
Il peut être complété par l’ajout de questions supplémentaires liées au contexte local ou à l’actualité. Il est recommandé de diffuser le questionnaire à la fois en format papier et numérique pour favoriser un taux de retour le plus significatif possible.
Troisième étape : analyser
Une fois les données collectées, il est nécessaire de les nettoyer pour supprimer les éventuels doublons et repérer les questionnaires incomplets. Effectuer des contrôles de cohérence permet également d’identifier les erreurs de remplissage, de les corriger et de valider les données pour obtenir une base de données fiable.
L’analyse des questionnaires s’effectue à l’aide d’un logiciel adapté – Modalisa – développé par la société Kynos. Il permet une compréhension fine de chacune des variables de l’enquête par des tris croisés et divers traitements statistiques.
Si l’échantillon le permet, il est également possible d’analyser des sous-populations telles que les associations issues d’un secteur en particulier ou les associations employeuses par exemple.
Quatrième étape : définir un plan d’action…
L’observation locale n’a de sens que si elle amène à l’action. L’analyse des données donne généralement lieu à la publication des résultats sous la forme d’infographie ou d’un rapport d’enquête et à une présentation publique. Le partage des résultats permet de croiser les regards des différents acteurs locaux pour construire une interprétation collective des résultats et des réponses adaptées.
La connaissance produite permet également d’identifier les besoins exprimés et de travailler sur un plan d’actions multi-acteurs dans lequel chaque partenaire peut contribuer en fonction de ses prérogatives. Seule une coordination de l’ensemble des acteurs concernés peut permettre de relever les défis d’un développement harmonieux et durable du monde associatif. L’observatoire local de la vie associative peut ainsi faire office de pivot pour favoriser le dialogue entre ces différents niveaux de réponses.
… et ajuster les politiques locales
En règle générale, un travail d’observation et d’enquête permet de découvrir entre 40 et 50 % d’associations en plus de ce qu’on estimait exister sur le territoire : des associations qui ne demandent jamais de subventions ou des micro-associations d’étudiants par exemple.
Pour Grégory Autier, directeur de la maison des associations d’Hérouville-Saint-Clair (Calvados), c’est le premier intérêt d’une démarche de ce type. « Cela permet également de cerner en quoi notre situation est spécifique ou non. Par exemple, à Hérouville-Saint-Clair, nous nous sommes aperçus que 30 % des associations étaient employeuses (contre 13 % au niveau national). Cela permet d’ajuster les politiques locales à la réalité du territoire, par exemple de proposer des formations plus adaptées en fonction des types d’associations repérés.»
Thomas Lauwers, chargé de mission à la Maison des associations de Roubaix,
Sylvain Rigaud, chargé de mission au RNMA
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Une structuration collective d’acteurs.
D’emblée la démarche a été pensée avec quatre têtes de réseaux associatifs. Aujourd’hui elle est pilotée par 18 structures, sectorielles et territoriales. -
L’inscription dans le temps long qui permet une lecture dynamique des mutations.
L’Orva a toujours cherché à s’inscrire dans une pérennité, d’abord sur une phase expérimentale triennale en 2010, puis sur une durée indéterminée dès 2014. -
Un soutien public pluri-partenarial.
En choisissant l’échelle supra-communale comme territoire d’intervention, le projet nécessitait l’implication de plusieurs institutions publiques. Leur soutien collectif permet à l’outil de s’affranchir des desiderata d’une collectivité unique. -
Un processus progressif.
L’outil s’est construit par étapes : trois années de préparation, puis trois années d’expérimentation, suivies de deux années d’extension territoriale et finalement deux ans à produire sans ressource humaine salariée. Aujourd’hui, 10 ans après le démarrage de la démarche, l’Orva a pu recruter fin 2018 et vise une forte montée en puissance.