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L’article 5 du projet de loi de finances 2020 qui réforme la taxe d’habitation prévoit que les associations sanitaires et médico-sociales pourront y être soumises. Ce qui créerait de fait une rupture d’égalité avec le secteur public.
Il faut lire attentivement l’article 5 du projet de loi de finances pour comprendre en quoi les associations sont menacées. Si la taxe d’habitation est supprimée pour les résidences principales, elle est en effet maintenue pour les résidences secondaires et pour « les locaux meublés des personnes morales ». C’est là où le bât blesse.
Cette formulation emporterait en effet l’application de la nouvelle taxe « THRS » issue du PLF 2020 aux établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés non lucratifs, alors que le II de l’article 1408 du code général des impôts exonère les établissements publics sanitaires, sociaux et médico-sociaux.
Charge nouvelle
L’application de cette mesure impliquerait une rupture d’égalité devant les charges publiques. Les associations partagent souvent les mêmes missions d’intérêt général que leurs homologues publics, avec des financements établis selon des modalités similaires.
Jusqu’à présent, un très petit nombre d’établissements privés non lucratifs sanitaires, sociaux et médico-sociaux étaient assujettis à la taxe d’habitation par les services fiscaux, car ceux-ci les assimilaient à des établissements publics. Si l’article 5 du PLF 2020 restait en l’état, il pourrait donc s’agir d’une charge nouvelle s’inscrivant dans un contexte budgétaire et tarifaire déjà très fragilisé.
Deux poids, deux mesures
Les associations représentent 95 % du secteur de l’exclusion, de l’enfance et du handicap, et près de 50 % des solutions pour les personnes âgées, à domicile et en établissement.
« Dans le secteur sanitaire, les 700 établissements de santé privés non lucratifs dits Espic (sur 3 000 au total environ) sont parfois les seuls hôpitaux respectueux pleinement des valeurs et règles du service public hospitalier, avec une pratique sans aucun dépassement d’honoraires. Alors que le gouvernement a fait passer en catimini une ordonnance pour sécuriser juridiquement l’activité libérale avec dépassements d’honoraires des médecins hospitaliers au sein des hôpitaux publics, pour une activité médicale que la Sécurité sociale paye deux fois finalement ! Deux poids, deux mesures… » commente amèrement un médecin, président de la commission médicale d’un grand établissement réputé.
Pourquoi les établissements publics sont-ils exonérés et pas les privés non lucratifs ?
L’exonération du II de l’article 1408 du CGI qui bénéficie aujourd’hui aux seules structures publiques est une interprétation de l’expression « établissements d’assistance », qui date de l’après-guerre.
Nous sommes bien loin des locutions juridiques actuelles du secteur, avec les « établissements de santé » de la loi hospitalière de 1991, ou « sociaux et médico-sociaux » de la loi de 2002. Le Groupe des 13 demande que cet article soit complété, en ajoutant après le mot « publics » les mots « privés non lucratifs ».
Les usagers qui acquittent parfois un tarif hébergement dans le secteur du handicap ou de la gérontologie, pourraient également subir l’impact de la taxe d’habitation dans le tarif.
Injustice
Face à cette situation, 13 grandes associations et organisations représentatives du secteur privé non lucratif sanitaire, social et médico-social, dites Groupe des 13 (1), se sont mobilisées. Dans une lettre commune adressée au Premier ministre le 17 octobre, elles lui font part de ce qu’elles vivent comme une injustice et lui demandent de mettre fin à une situation qu’elles jugent anormale.
Un moyen de mettre la pression sur le gouvernement alors que le projet de loi de finances est actuellement en cours de discussion au Parlement et doit être adopté d’ici la fin de l’année.
(1) APF France handicap - Arpavie - Fondation partage et vie - Groupe SOS - Croix rouge - Groupe vyv - FAS - Petits frères des pauvres - Fédération Addiction - UNAFTC - Fédération Santé et Habitat - Uniopss - Fnisasic.