L’éducation populaire se réinvente

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L’éducation populaire se réinvente

© Olivier Rault/AdobeStock

Le Cnajep et La Jeunesse au Plein Air fêtent cette année respectivement leurs 50 et 80 ans. Derrière ces vénérables institutions, beaucoup d’associations font de l’éducation populaire sans le savoir ou le revendiquer. Quitte à aborder de nouveaux champs ou séduire de nouveaux publics.

Qu’est-ce que l’éducation populaire ? « Pendant longtemps, on considérait que relevaient de l’éducation populaire ceux qui s’en réclamaient, tant le secteur était divers avec de très nombreux acteurs, laïcs ou confessionnels », explique Emmanuel Porte, chercheur à l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep).

Diversité des pratiques

Aujourd’hui, et depuis une quinzaine d’années, les observateurs regardent davantage les pratiques. Selon Jean-Marie Mignon, historien du secteur, « s’inscrire dans un ciné-club de lycée ou dans une troupe de scouts, être actif dans une maison de quartier, adhérer à un collectif de défense de l’environnement, à un atelier d’expression artistique, animer une association de soutien des droits de l’homme, participer à une université populaire ou à l’une de ces innombrables associations proposant des activités socio-éducatives et socioculturelles sur le chemin de la découverte du monde, en invitant chacun à y prendre sa place : tout cela manifeste, de la part de ceux qui s’y investissent, un engagement plus ou moins profond dans le champ large et varié de l’éducation populaire » (1).

Pour Emmanuel Porte, on peut parler d’éducation populaire lorsqu’il y a simultanément une action portée par l’association (autour d’un projet politique) et une réflexion sur la manière, la méthodologie, la façon de mener cette action : « s’il y a séparation des deux, il y a plus difficilement d’éducation populaire ».

Nouveaux collectifs

Pour les chercheurs, on assiste à partir de la fin des années 1990 à un double phénomène. D’une part, de nouveaux collectifs se sont emparés de l’éducation populaire à un moment où elle n’était plus vraiment à la mode : c’est par exemple, dans le domaine de l’économie l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac), dans celui de la lutte contre les inégalités l’Association de la fondation étudiante pour la ville (Afev) ou dans le domaine de la culture scientifique et technique Les Petits Débrouillards.

D’autre part, plus récemment (2000-2010) ont émergé des collectifs qui ne sont pas forcément liés aux domaines traditionnels de l’éducation populaire (culture, sport, jeunesse…) mais qui s’en revendiquent : Framasoft dans le champ du numérique, Nuit Debout au cours desquelles on a vu se mettre en place des commissions éducation populaire ou des universités populaires, des associations ou des coopératives militantes, plus revendicatives qui, autour d’une personnalité comme Franck Lepage, utilisent des méthodes ouvertes, participatives et actives, ou en inventent de nouvelles comme les désormais fameuses « conférences ­gesticulées ».

Troisième cycle de l'éducation populaire

Faut-il opposer ces nouveaux acteurs aux « vieilles dames » du secteur ? « On voit des structures anciennes qui réaffirment leur dimension éducation populaire », explique Emmanuel Porte qui cite ainsi ADT-Quart Monde, mais également des structures comme le Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (Cnajep) ou la Ligue de l’enseignement.

Une certaine méfiance perdure tout de même… Le responsable d’une jeune association explique : « il y a toujours un regard un peu méfiant de nos associations aux gènes libertaires vis-à-vis des grandes structures telles que le Cnajep ». Emmanuel Porte complète en regardant du côté de la recherche : « le renouveau est net et perceptible dans la recherche universitaire ». On en a un bon exemple avec les travaux qu’il a coordonnés dans une récente publication de l’Injep (2).

Un autre chercheur, Frédéric Chateigner, fait même l’hypothèse d’un « troisième cycle » de l’éducation populaire après celui du XIXe siècle et celui de l’après-guerre jusqaux années 1970.

Pour les adultes aussi

Une autre évolution relevée par Emmanuel Porte concerne les publics. « Depuis la guerre, on associait politiques jeunesse et éducation populaire. Or, les nouveaux collectifs qui se revendiquent de l’éducation populaire ne s’adressent pas spécifiquement aux jeunes mais à tous les adultes – ce qui d’ailleurs rappelle l’éducation populaire du XIXe siècle. On s’adresse à l’adulte citoyen, parfois dans le cadre d’actions de formations professionnelles. »

La référence rejoint les démarches autour du pouvoir d’agir des habitants, de ­l’empowerment ou du community ­organizing. « On le constate nettement dans les centres sociaux par exemple, où les deux références se croisent pour renouveler les projets associatifs. »

Nouvelles thématiques de l'éducation populaire

Traditionnellement ancrée dans la culture, les sports et la jeunesse, l’éducation populaire a également investi de nouvelles thématiques. Elle est en particulier très ­présente dans le champ du numérique autour du mouvement des logiciels libres, des données personnelles et plus globalement de ce qu’on appelle les communs.

Elle porte ainsi une réflexion sur les outils mais aussi sur la manière dont ils impactent la vie en société. « Est également requestionnée par ce biais la gouvernance associative : comment est-elle influencée par ces outils ? Comment peut-elle être plus participative ? »

La pédagogie active et l’animation de groupe ont également investi le champ de l’écologie. À côté de la traditionnelle éducation à l’environnement, on a vu là encore apparaître de nouveaux militants, plus jeunes, plus militants, comme ceux qu’on retrouve autour d’Alternatiba. La vieille dame semble plus vivante que jamais !

Un article de Michel Lulek

(1) « L’éducation populaire en permanente évolution » dans « Les Grands penseurs de l’éducation », Éditions Sciences humaines, 2018.
(2) « Éducation populaire : politisation et pratiques d’émancipation », Agora Débats/Jeunesse n° 76, 2017.

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