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Interview de Nils Pedersen, président de la Fonda
Pourquoi la Fonda a-t-elle décidé de travailler prioritairement sur les objectifs de développement durable ?
Dans la continuité de nos travaux prospectifs antérieurs, nous avons lancé notre université « Faire ensemble 2030 » pour imaginer la place et le rôle des associations à l’horizon 2030. Comme l’ONU a lancé son propre agenda 2030 autour des objectifs de développement durable (ODD), nous avons décidé de nous greffer dessus. En abordant des thématiques précises, nous nous ancrons davantage dans le réel des associations.
Nous nous posons également la question : comment les associations ont-elles la capacité de transformer le monde ? Nous voulons montrer qu’à leur échelle les associations sont porteuses de solutions et qu’en unissant leurs paroles et leurs actions elles peuvent contribuer à atteindre ces ODD qui représentent des défis vitaux pour la planète et l’humanité.
Que sont exactement ces ODD et comment les associations les prennent-elles en compte ?
Les Objectifs de développement durable portés par l’ONU « visent à éradiquer la faim et la pauvreté d’ici 2030, tout en reconnaissant que le développement humain et la préservation de notre planète vont de pair. » Ils sont au nombre de 17 et couvrent des thèmes aussi variés que la lutte contre les inégalités, l’accès à une alimentation de qualité, l’égalité entre les sexes ou le défi énergétique.
Sans être l’alpha et l’oméga d’une responsabilité collective, les ODD dressent un nouvel horizon vers lequel nous tourner. Si les associations ont été précurseurs sur beaucoup d’ODD, le fait qu’elles ne partagent pas un cadre commun et ne parlent pas le même langage les fait paraître déconnectées par rapport à ces grands objectifs. Les grandes entreprises savent très bien communiquer alors que les associations qui font des ODD sans s’en rendre compte, les ont si bien intégrés, qu’elles ne l’affichent pas !
Or, il faut le dire et le faire savoir. C’est ce que nous voulons permettre avec les Ateliers du Faire ensemble que nous lançons dans la suite de notre université. Ouverts à tous, ils ont pour ambition principale de créer des synergies entre l’ensemble des acteurs d’un territoire, pour construire des communautés d’action au service de l’atteinte des ODD.
Mais peut-on « transformer le monde » depuis son association ?
La responsabilité collective de transformer le monde est de toutes les associations. Que voulons-nous à l’horizon 2030 ? Un futur durable. Pour y arriver, il est nécessaire qu’elles adoptent une grammaire commune sur les ODD et qu’elles réussissent à montrer en quoi leurs actions vont dans le sens de ces ODD.
Il s’agit aussi de reconnecter les échelles et de réussir à faire comprendre comment les actions locales s’inscrivent dans un contexte plus global. Même sur des sujets qui paraissent nous échapper, les associations font preuve de réactivité et de compétence. Prenons l’exemple de ce que les politiques appellent la « crise migratoire ». Sur cette question les associations agissent et sont efficaces.
Comment être plus efficace ?
Il faut qu’on puisse mieux travailler ensemble. Si on a l’objectif d’éradiquer la pauvreté en 2030, l’État seul n’y réussira pas. Et les Petits Frères des Pauvres non plus. Il faut donc sortir de nos silos respectifs et que les ODD soient traités de manière concertée avec les pouvoirs publics, les entreprises et les acteurs d’un vaste tiers-secteur dont les associations sont la force principale.
Les individus ont souvent du mal à faire du collectif. C’est une première difficulté. Mais lorsqu’ils réussissent à le faire – et le monde associatif en est le meilleur exemple – c’est souvent l’État qui a du mal à faire confiance aux acteurs associatifs. Pourtant ces derniers sont très bien placés pour répondre aux défis car ils sont dans la pratique et dans l’expertise.
Il faut défendre l’idée d’une véritable expertise associative en matière d’ODD. Les Ateliers du Faire ensemble visent précisément à renforcer et faire reconnaître cette expertise associative. Nous invitons l’ensemble des associations intéressées à y prendre part !
Propos recueillis par Michel Lulek