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Interview d'Audrey Baudeau, déléguée générale du Cnajep
Peut-on parler de renouveau de l’éducation populaire ?
L’éducation populaire a continuellement été dans l’innovation et, de tout temps, elle a attrapé les questions qui se posaient à la société. Il y a certes des acteurs nouveaux qui participent de l’éducation populaire sans en être des acteurs historiques, mais on observait déjà cela dans le passé. Ce que je note en revanche, c’est que les périodes électorales qui étaient traditionnellement des moments de débat ne sont plus les seules, et même qu’elles sont de moins en moins plébiscitées.
D’où un intérêt grandissant pour la question : comment construire des citoyens ? La démarche proposée par l’éducation populaire reste d’actualité : inviter les citoyens à regarder la société, à l’analyser ensemble, à débattre, réfléchir, et agir. C’est une démarche globale qui permet ensuite de se confronter ou de conforter des décisions politiques.
Les pouvoirs publics y sont-ils sensibles ?
Malheureusement, ce genre de démarche, collective, critique, n’est guère dans l’air du temps. On préfère aujourd’hui regarder les innovations qui avancent vite, qui sont souvent des initiatives plus individuelles et moins politiques, alors que l’éducation populaire inscrit son action dans un temps long, prend le temps du débat pour mieux avancer ensemble.
Or, aujourd’hui, l’éducation populaire n’est pas identifiée politiquement. Il y a clairement pour nous un enjeu de reconnaissance de l’éducation populaire comme complémentaire de l’Éducation nationale, mais aussi comme indispensable tout au long de la vie.
À quelles difficultés sont confrontées les associations d’éducation populaire ?
Tandis que les enjeux sociétaux sont énormes (autour des transitions numérique, écologique…) et que des dynamiques agissent face à de nombreux problèmes, les associations d’éducation populaire, comme le reste du mouvement associatif, ont de moins en moins les moyens humains de leurs ambitions. Elles font face à des restrictions budgétaires continues et l’agenda d’un responsable associatif ressemble aujourd’hui à celui d’un P-DG ! Il est évident qu’il y a tension et que le travail des associations n’en est pas facilité.
Propos recueillis par Michel Lulek