Egalité hommes-femmes : encore un long chemin à parcourir...

Dans un de ses romans, Annie Ernaux rapporte une petite scène qui se réfère aux premiers jours de son mariage. Elle et son mari sont tous deux étudiants, « de gauche », cultivés, émancipés et ont ce qu'on appelle les idées larges. Ils révisent ensemble sur la table du salon. La cocotte minute siffle dans la cuisine et le compte-minute se met à sonner. Instant d'attente. Les deux étudiants toujours plongés dans leurs livres. « Égaux, unis » écrit Annie Ernaux. Finalement elle se lève, va éteindre le feu et s'occuper des légumes cuits. « Pourquoi moi ? » s'interroge-t-elle. Et de constater : « Différents, pas pareils. » À elle, comme « naturellement », de devoir s'occuper des choses ménagères...

Réalité dépassée ? (cette scène se passe dans les années 1960) Non. On sait que le travail domestique est encore massivement assuré, « naturellement », par les femmes. Deux rapports viennent de rappeler que l'égalité en la matière (et idem quant aux niveaux de salaires) est encore très présente.

Le premier rapport a été remis à la secrétaire d'Etat à la famille, Claude Greff, par le président de l'Observatoire de la parentalité en entreprise, Jérôme Ballarin, qui présente dix "bonnes pratiques" permettant, selon lui, d'impliquer davantage les hommes et de favoriser à la fois l'égalité professionnelle dans l'entreprise et un meilleur partage des tâches domestiques au sein du couple. Intitulé "Parentalité et égalité professionnelle hommes-femmes : comment impliquer les hommes ?", ce rapport est issu de consultations menées auprès de plus de 500 employeurs, d'experts et de représentants d'organisations patronales et syndicales. Ces bonnes pratiques sont illustrées par des témoignages d'hommes les ayant expérimentées et en faisant un bilan. Le rapport formule, à destination des pouvoirs publics, dix recommandations visant à inciter les entreprises à adopter ces nouvelles pratiques (campagnes d'information sur l'implication des hommes dans la vie familiale et domestique, allongement à un mois du congé paternité, promouvoir une formule de congé parental comportant une partie non cessible entre le père et la mère, campagne de formation des managers, etc.).

De son côté la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a été saisie par la commission des affaires sociales sur la proposition de loi n° 230 (2011-2012) relative à l'égalité salariale entre les hommes et les femmes présentée par Mmes Claire-Lise Campion, Michèle André, Catherine Génisson, M. François Rebsamen et les membres du groupe socialiste et apparentés. Un rapport sur ce projet de loi, rédigé par la sénatrice Michèle Meunier, vient d'être rendu public. Après avoir auditionné les principaux acteurs chargés de négocier les conditions de l'égalité salariale et pris l'avis d'experts, la délégation considère que, en matière d'égalité professionnelle - et plus spécifiquement salariale -, l'enjeu est moins de produire de nouvelles normes législatives que d'appliquer celles qui existent : « Derrière la question spécifique de l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, c'est la question plus large d'un équilibre sociétal qui est posée. Il s'agit de bâtir une société plus juste, plus équilibrée et davantage respectueuse des temps de vie professionnelle, personnelle et familiale dont doivent profiter les femmes, les hommes, mais également les enfants de notre pays. »

Le monde associatif, dans lequel se reflète la société, doit être interpellé sur ces questions. L'inégalité hommes-femmes ne se vit pas seulement en cuisine ou au bureau. Dans nos conseils d'administration, dans nos présidences d'associations, dans nos équipes salariées, qu'en est-il ? Ces deux rapports peuvent nous aider à y réfléchir.

Le rapport de Jérôme Ballarin

Le rapport de Michèle Meunier